Après s’être imposé en Tanzanie face au Burundi 1-0, une forte polémique anime le monde du football en général et le Cameroun plus particulièrement. Tout est parti du speech d’après match du président de la Fécafoot qui s’est adressé aux joueurs face à ce qu’il considère comme une contre performance et un manque de cohésion, voire de discipline au sein d’un groupe aussi talentueux que celui actuel.
En effet, les discours d’après match sont une tradition dans le football, une sorte d’autocritique (quand certains aspects n’ont pas fonctionné). Un discours motivateur pour resserrer les rangs, mais aussi de félicitations (en cas de performance satisfaisante) à l’endroit des joueurs et du staff dans une certaine mesure. Dans le cas d’espèce, le Cameroun a enregistré son premier succès pour les qualifications de la CAN 2023. Mais visiblement, la performance n’était pas du tout du goût de Samuel Eto’o.
il a recadré les joueurs en pointant du doigt leur comportement à l’approche de la Coupe du Monde.
« Je ne suis pas du tout content. Vous représentez l’équipe nationale du Cameroun. Je m’en fout de qui il y a en face de vous, vous devez faire le job. J’ai pleuré pendant des années, car on manquait des Coupes du monde, mais je sais quel problème j’avais. Cela ne va pas se passer tant que je serai président. J’ai pris cette présidence pour changer les choses. Personne n’a sa place assurée dans cette équipe. Si vous voulez porter le maillot de cette équipe, vous faites le job. Sinon, ne venez pas et je serais content. J’ai été à votre place pendant très longtemps… j’ai été le meilleur étant assis là et je sais pourquoi j’ai raté. Je vais tout vous donner, même ma vie… Mais quand on vient, c’est le Cameroun. Il n’y a rien de plus beau. J’y arriverai avec vous ou sans vous. Si vous voulez être du voyage, il va falloir vous bouger. Personne n’est assuré d’être au Mondial. Si c’est ce que j’ai vu aujourd’hui personne n’y sera« , a indiqué le patron du football camerounais. Des propos qualifiés de durs pour les plus susceptibles. Qu’en est-il de la réalité?
La pratique courante d’autocritique d’après matchs est assez vieille et le ton utilisé est toujours dur, l’objectif recherché est celui de booster, réveiller, redynamiser les troupes. Le message est passé, les joueurs sont prévenus sur l’objectif réel et à moyen terme pour ce groupe qui est à 05 mois de la coupe du monde. L’objectif n’est donc pas seulement de se qualifier pour la CAN ivoirienne. A la réalité, c’est un groupe assez homogène avec des cadres vainqueurs de la CAN 2017, de ceux qui ont intégré l’équipe lors des CAN 2019 et 2021, ainsi que de nouveaux. Certains n’ont pas su s’investir à fond lors de ce match, pourtant ils ont eu un match amical face aux lions locaux 05 jours avant. Pour certains observateurs, il y a avait assez de suffisance dans le jeu, les lions auraient sous-estimé l’adversaire, assez d’égoïsme et d’individualisme dans le jeu d’attaque avec des noms qui reviennent. On se rappelle de la sortie du capitaine Aboubacar Vincent qui avait déjà critiqué en pleine interview ses coéquipiers après la défaite face à l’Égypte.
Un cas pas isolé
Le cas du Cameroun n’est pas une exception. En 2018, le président de la Fédération nigérienne, le Colonel-Major Djibrilla Hima Hamidou dit Pelé, avait tenu des propos durs aux joueurs de l’équipe nationale, suite à une vidéo. Il déclarait : « Il s’agit de l’image de notre pays. Je mets cette sortie sur le score lourd concédé. Je leur concède les problèmes de préparation et de primes… C’est une manière très maladroite… » La semaine dernière encore les contre-performances de l’équipe ont conduit le président Noël le Graet à prendre la parole face aux Bleus. Le président de la Fédération française de rugby Bernard Laporte n’avait pas aimé la défaite du XV de France en 2017 face à l’Afrique du Sud (37-14) et il l’avait bien fait comprendre aux joueurs. La sélection ivoirienne avait été libérée après trois jours passés en détention. Après sa contre-performance lors de la CAN 2000. Elle avait subi un stage d’éducation patriotique de trois jours au camp militaire de Zambakro, à 18 kilomètres de la capitale Yamoussoukro. Une formation du général Gueï, qui leur avait inculqué la fibre civique. Il faut tout de même relever qu’aucune équipe n’est venue faire figuration, d’autant plus qu’il y a eu un 1er tour préliminaire avant cette phase des poules.
Cette sortie n’a pas été appréciée de la même manière sur les médias classiques comme sur les réseaux sociaux par certains. Ces derniers qui jugent que le président Eto’o aurait dû rester à sa place, prétendent qu’il fait des one-man-show pour apporter la preuve de l’apport de «l’homme providentiel» qu’on dit. Ils ont d’ailleurs détourné les propos du coach Song qui s’est dit satisfait par ses joueurs, malgré des choses à régler avec le temps. Il ne répondait pourtant pas à son patron.
Les Lions ne peuvent pas tout se permettre
D’autres affirment que des joueurs n’ont pas apprécié les « remontrances » de Samuel Eto’o diffusées sur les réseaux. C’est André Zambo Anguissa qui a estimé que la pression actuelle n’est pas bénéfique pour la cohésion de l’équipe. Il comprend que les fans espèrent des scores lourds. Sauf que toutes les équipes se donnent corps et âme dans leur quête de victoire. La vidéo de 2min 31s est taxée de contre-productive par les détracteurs du président Eto’o.
En somme, qu’on aime Samuel Eto’o Fils ou pas, l’opinion salue à juste titre son dynamisme, engagement, il fait bouger les lignes depuis son arrivée et est plein de bonnes intentions. Dans sa sortie de jeudi dernier, le président Eto’o a tenu à rappeler aux Lions et ceux qui prétendent vouloir arborer le Vert Rouge Jaune un jour, ses valeurs. Qu’ils sont privilégiés en étant sélectionnés, le talent, tous l’ont mais doivent plus travailler leur esprit d’équipe, de gagne, de victoire avec panache. Les lions ne peuvent donc pas se permettre de jouer décontractés. Il est claire que ces éliminatoires sont un gallot d’essai pour Qatar 2022 dont l’objectif pour le sélectionneur Rigobert Song Bahanag est de jouer au moins les 1/2 finales. Pour le président Eto’o, c’est de jouer la finale, soit au moins 07 matchs. Quand on est ambitieux et objectifs on comprend le travail titanesque de la Fédération camerounaise de Football.
Florent Meyong